Ventabren : un parc solaire citoyen (13)

Un parc photovoltaïque, créé et détenu par une association, une commune et une coopérative et qui favorise l’agriculture locale, sans recours à un opérateur privé ? L’opération est rare et demande du temps et de la mobilisation. Mais Solaris Civis, une installation qui produit environ 7 800 MWh/an depuis avril 2023 à Ventabren, commune de 5 500 habitants dans les Bouches-du-Rhône, montre que c’est possible.

8 ans de travail bénévole

« On a imaginé ce concept en 2009, on voulait que les citoyens participent au projet. On a communiqué bien en amont avec eux, la commune et les associations de défense de l’environnement… », se rappelle William Vitte, président de l’association Ventabren Demain, à l’origine du projet. Plutôt que de confier le développement du parc photovoltaïque à une entreprise – elles demandent en contrepartie une rémunération et une place souvent majoritaire dans la gouvernance – l’association monte le projet elle-même et fait appel à une assistance à maîtrise d’ouvrage (AMO) pour la conception du parc. 

« Des bénévoles se sont impliqués pendant huit ans et tous avaient des compétences sur le montage de dossier, la protection de l’environnement, les finances, l’urbanisme… Cela nous a aidés, mais c’est avant tout une question de volonté. C’est compliqué, car il y a beaucoup de services de l’État qui interviennent », note William Vitte. « Sur l’environnement, il y beaucoup d’interlocuteurs et les études sont coûteuses et longues. C’est un vrai frein », ajoute Jean-Luc Petit, conseiller municipal de Ventabren, en charge des nouvelles technologies et de la transition numérique et énergétique.

166 000 euros d’investissement de la commune

La commune finance les études préalables, à hauteur de 160 000 euros. Puis la société Solaris Civis est créée par l’Association Ventabren Demain, la commune et Énergie Partagée Investissement qui investissent 450 000 euros (cf. encadré). Des prêts sont contractés pour financer les 4,8 millions d’euros de coût total du projet. Lauréat d’un appel d’offres de la commission de régulation de l’énergie (CRE), l’installation, qui produit l’équivalent de la consommation électrique de près de 7 000 personnes (hors chauffage et eau chaude), bénéficie d’un contrat de vente d’électricité à prix garanti sur 20 ans. 

Panneaux recyclés à 97 %

Selon Jean-Luc Petit, l’investissement initial de la commune a déjà été remboursé par Solaris Civis et la commune perçoit en plus chaque année environ 30 000 euros de revenus grâce aux loyers pour le terrain et à différentes taxes auxquels, s'ajoutent 40 % des dividendes. Par ailleurs, 30 % du capital de la société est ouvert aux habitants, pour permettre aux Ventabrennais d’investir leur épargne. La maîtrise du projet par les citoyens et les élus a également conduit à une amélioration de l’impact environnemental du parc solaire. Les panneaux photovoltaïques proviennent de l’usine Triade Électronique de Rousset, à moins de 30 km de Ventabren, qui a utilisé à 97 % des panneaux recyclés.

Production locale d’huile d’olive 

L’installation occupe 5 hectares d’une ancienne friche de 53 hectares, entre une autoroute et une ligne TGV. En concertation avec l’Office national des forêts (ONF) et la Chambre d’agriculture départementale, Solaris Civis a déplacé les 600 oliviers à l’abandon de ces parcelles vers d’autres terrains de la commune, plus adaptés et a créé un système d’irrigation. Aujourd’hui, deux exploitants agricoles s’en occupent, avec la volonté de développer la fabrication et la vente d’huile au niveau local. « C’est grâce aux associations environnementales à qui on a demandé de l’aide pour le cahier des charges, cela évite aussi les recours », note William Vitte. 

Difficile de trouver un point négatif, selon les acteurs de Solaris Civis. « Il y avait du dialogue et une habitude de travail sur ces questions entre élus et citoyens, cela est essentiel », ajoute Jean-Luc Petit. Aujourd’hui, des démarches sont en cours pour investir dans un deuxième parc juste à côté de l’existant, d’une puissance de 3 MWc sur environ 3,5 hectares, mais avec la volonté de développer une installation en autoconsommation collective, une solution encore peu développée en France à ce niveau de puissance.